Les scientifiques roumains de l’Institut de Géologie Marine et de Géo-écologie (GeoEcoMar) espèrent mieux comprendre les causes de la raréfaction de l’oxygène sur les côtes de la mer Noire et ses effets au sein des populations de poissons avec un projet financé par l’Union Européenne appelé HYPOX. Par une surveillance continue des écosystèmes côtiers autour de la mer Noire, les chercheurs espèrent arriver à une meilleure gestion de la pêche. Selon Traian Gomoiu, responsable du projet pour la Roumanie au sein de GeoEcoMar, l’hypoxie persistante observée en mer Noire peut conduire à la perte de la biodiversité, la dégradation irréversible de l’écosystème et l’effondrement de la pêche.
Déploiement des outils d’observation Hypox (22 mai 2010)
Crédits : Silviu Radan, Senior scientist, GeoEcoMar
Les populations des rives de la mer Noire ont eu un exemple concret de l’impact de l’hypoxie en 2010 avec la perte de plusieurs tonnes de poissons retrouvés morts sur la ligne côtière de la mer Noire roumaine. Le Professeur Secrieru, chercheur de GeoEcoMar à Constanta, indique qu’à la suite de ce phénomène les chercheurs ont voulu procéder à une analyse approfondie sur la façon dont l’écosystème est perturbé par le manque d’oxygène et identifier les moyens de récupération post-hypoxie.
Les scientifiques ont observé de fortes diminutions de l’oxygène le long de la côte roumaine à proximité d’établissements humains et d’installations industrielles, ainsi que le long de routes maritimes. La pollution chimique combinée à un important afflux d’eau douce apportée par les crues du Danube entrave la pénétration d’oxygène dans les couches inférieures de la mer. L’eau douce charrie des engrais agricoles qui peuvent également entraîner le développement d’algues grandes consommatrices d’oxygène.
Une partie de l’équipe Hypox sur le bateau « Mare Nigrum » de GeoEcoMar (mai 2010)
Crédits : Silviu Radan, Senior scientist, GeoEcoMar
M. Secrieru, Chef du laboratoire de Géoécologie Marine et de Géochimie de GeoEcoMar Constanta, explique que les pressions écologiques ont diminué en mer Noire au cours des 20 dernières années et croit que cela est dû à trois facteurs: des méthodes agricoles moins agressives, la fermeture d’une usine d’engrais en bord de mer, et le déclin de l’activité industrielle en raison du ralentissement économique. Il dit cependant que la santé des écosystèmes est encore précaire et qu’il est difficile de prédire son évolution sans un programme de surveillance. Il serait idéal de faire ce suivi régulier, surtout lorsque la température augmente ou diminue, afin de faire des prédictions que ce soit pour la recherche fondamentale ou pour les évaluations économiques.
Le Professeur Nicolae Papadopol, directeur scientifique du Musée des sciences naturelles de Constanta, estime qu’il y a encore des efforts à faire pour contrôler l’hypoxie notamment en prenant des mesures urgentes pour réduire les émissions, et en mettant en place ou en améliorant les usines de traitement des eaux usées. Le Professeur Verena Tunnicliffe de l’Université Victoria, en Colombie-Britannique (Canada), conclut de son expérience propre que les animaux réagissent rapidement aux variations de niveau d’oxygène. Les migrations en sont affectées et la pêche commerciale pour des animaux comme les crevettes et les crabes peut en pâtir.
Le sujet abordé par Hypox pourrait tout à fait s’inscrire dans le cadre du Centre International d’Etudes Avancées « Danube – Delta du Danube – Mer Noire ». Ce centre en cours de développement se veut multidisciplinaire : Sciences de la Vie et de la Terre, Sciences Economiques et Sciences Sociales. Il est à l’initiative de GeoEcoMar et a été déclaré comme projet prioritaire par les autorités roumaines lors de la dernière conférence nationale sur la recherche et l’innovation.
Source : BE Roumanie numéro 22 (11/03/2013) – Ambassade de France en Roumanie / ADIT – http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/72497.htm