En Nouvelle-Calédonie, des scientifiques ont découvert que des coraux de mangrove pouvaient s’adapter rapidement à des conditions environnementales extrêmes. Ils se développent dans des lieux « où la température, l’acidité et l’oxygénation de l’eau atteignent des valeurs comparables à celles attendues dans les scénarios les plus pessimistes à l’horizon 2100 ».

Ces sites particuliers et méconnus sont explorés depuis plusieurs années. C’est le cas, notamment, du site de Bouraké, en Nouvelle-Calédonie, dont les propriétés physiques et chimiques naturelles sont extrêmes : température élevée, acidification et désoxygénation. Ces conditions fluctuent avec la marée en raison de la forme des reliefs du lagon.

En réalité, notre récente étude montre que la population de Bouraké est identique à celle présente à l’extérieur, mais la taille de la population est réduite (en terme génétique) par rapport au site de référence externe. C’est comme si seules certaines larves arrivant à Bouraké de l’extérieur étaient filtrées, et qu’une partie seulement survivait à l’environnement hostile.

Riccardo RODOLFO-METALPA, biologiste marin à l’IRD au sein de l’unité ENTROPIE et l’un des auteurs de l’étude

Les résultats de l’étude démontrent une grande flexibilité des coraux, facilitant ainsi leur tolérance au stress des conditions extrêmes de leur environnement. Ils ont également détecté un fort effet sélectif sur certains gènes des coraux : des protéines repérées dans ces gênes suggèrent une mutation ponctuelle unique. Cette mutation pourrait être à l’origine de cette sélection naturelle.

Ces coraux ne sont pas exceptionnels en tant que tels, car ils existent naturellement partout. À Bouraké toutefois, ils ont développé des mécanismes qui leur ont permis de résister, de se reproduire et de prospérer.

Riccardo RODOLFO-METALPA

Le « laboratoire naturel » de Bouraké est étudié par les scientifiques en conditions réelles, afin de comprendre comment certains coraux peuvent résister à des conditions extrêmes, quels sont leurs mécanismes d’acclimatation, et à quoi pourraient ressembler les récifs coralliens du futur.

Mais peut-on vraiment sauver la population corallienne ? Riccardo RODOLFO-METALPA s’est exprimé à ce sujet dans une interview pour France Info Outre-mer. Pour lui, les études sont importantes pour comprendre, avancer et donner de l’espoir, mais elles ne permettront pas de « repeupler le récif corallien en entier ».

Ça deviendrait irresponsable de notre part si je vous disais : « Oui, on va sauver les récifs coralliens grâce à ces coraux résistants que j’ai trouvés dans cet endroit particulier ». Ce sont des pistes importantes, ça nous donne de l’espoir, mais il faut garder en tête que la seule solution pour sauver une partie des récifs, c’est de limiter l’effet du réchauffement climatique sur les récifs coralliens, et donc de diminuer grandement les émissions de CO2. C’est la seule et unique solution que l’on a !

Riccardo RODOLFO-METALPA
Nouvelle-Calédonie_Vue_du_Phare_Amédée
Au large de Nouméa, l'îlot Amédée constitue une aire de gestion durable des ressources (AGDR) de la province Sud de la Nouvelle-Calédonie. Réputé pour ses fonds sous-marins, il est situé sur une zone classée réserve marine. © Ftissantier